Déclaration
Résumé
M. LUIS ALBERTO ARCE CATACORA, Président de la Bolivie, a relevé qu’aujourd’hui, nous sommes confrontés à une crise capitaliste multiple et systémique qui met de plus en plus en danger l’humanité et la planète. Il a appelé à réfléchir aux origines des diverses crises afin de changer ce système « qui reproduit la domination, l’exploitation et l’exclusion de larges majorités, qui génère la concentration des richesses et qui privilégie la production et la reproduction du capital plutôt que de la vie ». Parallèlement à cette crise du capitalisme, il a vu la fin d’un monde unipolaire et la construction d’un nouvel ordre mondial, en espérant que cet ordre mondial bénéficiera à tous les États et peuples du monde. Convaincu qu’« un autre monde est possible », il a fait une série de propositions, notamment celle de déclarer le monde « zone de paix ».
Le Président s’est dit préoccupé par le nombre considérable de conflits armés qui affligent l’humanité et constituent un lourd tribut humain, et, dans de nombreux cas, causent la destruction de notre patrimoine culturel et environnemental. Il a réitéré que, quelles que soient l’origine, la nature ou l’explication géopolitique des tensions internationales, la Bolivie continuera de choisir la culture du dialogue entre les nations, à travers la diplomatie populaire. Cependant, a-t-il constaté, nous assistons à la détérioration croissante du dialogue multilatéral à cause des « caprices des puissances capitalistes » qui ne veulent pas se résigner à l’existence d’un monde multipolaire. Il n’a pas manqué de rappeler que les États sud-américains et caribéens de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) ont déclaré leur région « zone de paix » dès 2014 et plaident pour que cette Assemblée soit l’espace d’un accord historique, un accord où le dialogue et la diplomatie prévalent sur toute controverse, et où le monde soit également déclaré « zone de paix ».
Le Chef d’État bolivien a ensuite proposé de substituer les dépenses militaires liées à la fabrication d’armes de destruction massive par des dédommagements pour les pauvres de ce monde. Il a souligné la concentration d’un grand nombre de ces armes dans un petit groupe de pays qui, en refusant de les éliminer, privilégient leurs intérêts géopolitiques et mettent en danger la paix et la sécurité de la planète. Neuf pays disposent aujourd’hui de 12 705 ogives nucléaires, a-t-il précisé. Il a également plaidé contre la mercantilisation des systèmes de santé en arguant que face à la grave crise sanitaire de la COVID-19, il est impératif de renforcer les systèmes de santé universels dans lesquels l’État remplit son obligation de protéger et de garantir les droits collectifs de ses citoyens.
Le Président bolivien a ensuite évoqué la nécessité d’un programme mondial de souveraineté alimentaire en harmonie avec la « Terre nourricière » en demandant, entre autres, de garantir aux petits producteurs de meilleures conditions de production, y compris l’accès aux semences, aux engrais, à la technologie, aux infrastructures, aux crédits, aux marchés, et cela en pleine harmonie avec la Terre Mère. Il faut reconstruire les capacités productives et économiques des « pays de la périphérie » victimes de la logique de la concentration du capital, a-t-il tonné. Plus concrètement, il est vital à son avis de restructurer l’architecture financière mondiale en vue d’alléger la dette extérieure au niveau mondial, afin que les pays en développement aient les moyens de mettre en œuvre souverainement des politiques sociales de développement économique et social. Et, reprenant le « cri des pays du Sud », il a demandé que les relations commerciales qui continuent actuellement de ne profiter qu’au Nord soient rééquilibrées. Le Président Catacora a ensuite exposé des éléments clefs de l’expérience de son pays, notamment la reprise de la construction du Modèle Économique Social de Communauté Productive, un modèle économique souverain dans lequel « nous n’acceptons pas et n’accepterons pas les impositions du Fonds monétaire international », a-t-il indiqué. Avec une inflation de 1,6% au mois d’août, il s’est targué d’une économie bolivienne qui a l’inflation la plus faible de la région et l’une des plus faibles du monde.
Alors que la crise climatique exige la responsabilité et la solidarité, le Chef d’État s’est indigné du fait que les responsables des émissions de gaz à effet de serre demandent désormais que chaque pays poursuive l’illusion de la « décarbonation » d’ici à 2050, sans tenir compte des responsabilités historiques des pays développés, ni des capacités et limites des pays en développement, pour qui l’accès aux technologies propres de pointe devient chaque jour plus inaccessible. À cet égard, il a observé que les fonds alloués par les pays les plus développés à la crise en Ukraine sont 20 fois supérieurs à ceux au Fonds vert. Il a également abordé les questions de l’industrialisation du lithium, une ressource dont dispose la Bolivie et pour laquelle elle revendique sa souveraineté et rejette toute tentative d’ingérence pour faire main basse sur ses ressources.
Le Président a également abordé les questions du passage à l’échelle régionale de la lutte contre le trafic de stupéfiants, arguant que la guerre contre la drogue criminalise les pays du Sud tout en protégeant le blanchiment d’argent; du renforcement des mécanismes internationaux permettant de garantir un traitement préférentiel pour les pays enclavés, notamment le « droit à la mer »; de l’élargissement de la vision limitée des droits humains et de la démocratie; ou encore de la solidarité intergénérationnelle. La Bolivie a même appelé à déclarer une décennie de la « dépatriarcalisation » pour lutter contre toutes formes de violence à l’égard des femmes et des filles et à rejeter les sanctions unilatérales une fois pour toutes. Le Président bolivien a conclu en invitant la communauté internationale à revitaliser véritablement le multilatéralisme pour notamment reconfigurer l’ordre mondial fragile et le rendre « pluriel et solide ».
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