Déclaration
    Secrétaire général des Nations Unies
    Son Excellence
    António Guterres
    Secrétaire général
    Kaltura
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    Résumé

    M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a présenté le rapport d’activités de l’Organisation (A/75/1), en rappelant qu’en janvier dernier, devant l’Assemblée générale, il avait identifié « quatre cavaliers des ténèbres », quatre menaces qui hypothèquent notre avenir commun: les tensions géostratégiques mondiales, les plus graves que l’on ait vues depuis des années; la crise climatique, qui menace notre existence même; la méfiance profonde qui ne cesse partout de gagner du terrain; et la face obscure du monde numérique.  Aujourd’hui, le Secrétaire général a identifié un cinquième cavalier « tapi dans l’ombre »: la pandémie de la COVID-19.

    Chaque jour, s’est-il alarmé, son sinistre bilan s’alourdit.  Les familles sont endeuillées, les sociétés chancellent et les piliers déjà fragilisés sur lesquels repose notre monde vacillent encore un peu plus.  La COVID-19 a mis à nu les fragilités du monde, braquant les projecteurs sur les inégalités croissantes, les catastrophes climatiques, les divisions de plus en plus marquées au sein de nos sociétés et de la corruption rampante.  Elle a réduit à néant les progrès accomplis au cours des dernières décennies puisque pour la première fois en 30 ans, la pauvreté augmente et les indicateurs de développement humain sont en berne.  Jamais le monde ne s’est autant éloigné des objectifs de développement durable, s’est inquiété M. Guterres.  « Les gens souffrent.  La planète est en feu.  Le monde est aux abois, stressé: il se cherche de véritables leaders, prêts à l’action. »

    Celles et ceux qui ont donné naissance à l’ONU, il y a 75 ans, a rappelé le Secrétaire général, avaient survécu à une pandémie, à une dépression mondiale, à un génocide et à une guerre mondiale.  Aujourd’hui, nous nous trouvons à un moment historique semblable à 1945.  « Cette pandémie, c’est du jamais vu », mais c’est aussi le genre de crise que le monde est condamné à revivre sous une forme ou une autre, encore et toujours.  Plus qu’un avertissement, la COVID-19 est une répétition générale pour tous les défis dont le monde sera le théâtre.  Dès lors, le Secrétaire général a appelé à l’unité et à la solidarité, s’indignant que l’aide apportée jusqu’ici aux pays qui ont le moins de moyens soit totalement inadéquate.  Il faut se fier à la science et obéir au principe de réalité, a-t-il ajouté mettant en garde, contre le populisme et le nationalisme face à la pandémie.  Dans un monde interconnecté, il est grand temps de reconnaître une vérité toute simple, a-t-il tranché.  La solidarité relève de l’intérêt commun.

    Le Secrétaire général est ensuite revenu sur l’appel à un cessez-le-feu mondial qu’il a lancé lorsque la pandémie s’est installée.  Il a engagé à nouveau la communauté internationale à redoubler d’efforts pour y répondre d’ici à la fin de l’année.  « Lorsqu’un conflit fait rage en même temps qu’une pandémie, il ne peut y avoir qu’un seul vainqueur: le virus. »

    Mais, a estimé le Secrétaire général, il y aussi des raisons d’espérer: le nouvel accord de paix conclu entre le Gouvernement et les mouvements armés en République du Soudan; le début des négociations intra-afghanes et certains cessez-le-feu qui tiennent mieux que par le passé comme à Edleb en Syrie, ou encore l’accalmie à Gaza alors que l’idée d’annexer certaines parties de la Cisjordanie occupée a été mise de côté, du moins temporairement.

    Toutefois, dans les régions où les groupes terroristes sont particulièrement actifs, les obstacles à la paix seront beaucoup plus difficiles à surmonter, a concédé M. Guterres.  Il a évoqué la situation dans la région du Sahel et du lac Tchad où il a dit craindre que les groupes terroristes et extrémistes violents cherchent à exploiter la pandémie.

    Face au spectre de la famine en République démocratique du Congo, dans le nord-est du Nigéria, au Soudan du Sud et au Yémen, le Secrétaire général a appelé à nouveau la communauté internationale à redoubler d’efforts –sous la conduite du Conseil de sécurité– pour parvenir à un cessez-le-feu mondial d’ici à la fin de l’année.  « Il reste à peine 100 jours.  Le temps presse. »

    Il a aussi mis en garde contre une nouvelle guerre froide.  Notre monde ne supportera pas un avenir dans lequel les deux plus grandes économies diviseraient la planète de part et d’autre, chacune bardée de ses propres règles commerciales et financières, de son propre Internet et de ses propres capacités d’intelligence artificielle, a martelé le Secrétaire général.  Une fracture technologique et économique risque inévitablement de se muer en fracture géostratégique et militaire.  C’est ce que nous devons éviter à tout prix à son avis, a alerté le Secrétaire général.

    Passant à la riposte mondiale à la pandémie orchestrée par les Nations Unies, le Secrétaire général a fait valoir que sous la conduite de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), le système des Nations Unies a aidé les États –et en particulier les pays en développement– à sauver des vies et à contenir la propagation du virus.  Ses chaînes d’approvisionnement mondiales ont permis de fournir des équipements de protection individuelle et d’autres fournitures médicales à plus de 130 pays.  Grâce au Plan de réponse humanitaire global, l’ONU a apporté une aide salvatrice aux pays et populations les plus vulnérables, y compris aux réfugiés et aux personnes déplacées.  L’ensemble du système était en mode « urgence développement », à travers ses équipes de pays et ses orientations générales pour aider les gouvernements.

    L’ONU défend les efforts pour développer « un vaccin du peuple », qui soit abordable et accessible partout.  Le Secrétaire général a d’ailleurs pointé du doigt ceux qui chercheraient à conclure de leur côté des marchés qui ne bénéficieraient qu’à leur propre population.  Le « vaccinationalisme » n’est pas qu’injuste, il est aussi voué à l’échec, a-t-il pronostiqué, parce que personne n’est en sécurité si tout le monde ne l’est pas.

    De même, les économies ne peuvent tourner normalement en temps de pandémie.  C’est la raison pour laquelle le Secrétaire général a dit avoir plaidé en faveur d’un plan de sauvetage massif représentant au moins 10% de l’économie mondiale.  Il faut absolument veiller à ce que le monde en développement ne s’embourbe pas dans la ruine financière, l’escalade de la pauvreté et les crises de la dette, a-t-il souligné.  Pour éviter une « spirale fatale », il faut, selon lui, une mobilisation collective.  C’est la raison pour laquelle il a dit avoir pris l’initiative de réunir les dirigeants du monde entier dans une semaine au tour du thème du financement du développement à l’ère de la COVID-19 et après.  Le Secrétaire général a réitéré l’attention particulière qu’il porte aux femmes et aux filles, « cette moitié de l’humanité » qui subit le plus durement les conséquences sociales et économiques de la pandémie.  Si nous n’agissons pas maintenant, a-t-il mis en garde, l’égalité des sexes pourrait accuser un recul de plusieurs décennies.

    Au-delà des mesures d’urgence, les efforts de relance d’aujourd’hui doivent jeter les bases d’un monde meilleur pour demain.  Cette relance est ; selon M. Guterres, notre chance de réinventer les économies et les sociétés.  La communauté internationale dispose pour cela des feuilles de route de la Charte des Nations Unies, de la Déclaration universelle des droits de l’homme, du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et de l’Accord de Paris sur le climat.  Relance rime avec résilience et au niveau national, cela exige un nouveau contrat social, et au niveau international, un nouveau pacte mondial.

    Ce contrat social doit permettre de bâtir des sociétés inclusives et durables, a expliqué le Secrétaire général, en misant sur une nouvelle génération de politiques de protection sociale, comprenant notamment la couverture sanitaire universelle et la possibilité d’un revenu minimum universel.  L’inclusion signifie aussi de donner à toutes et à tous l’accès à l’éducation et aux technologies numériques, les deux grands vecteurs de l’autonomisation et de l’égalité de notre époque.  Cela requiert des systèmes fiscaux auxquels tout le monde contribue équitablement et de placer les droits humains au cœur de tous les efforts.

    Pour être véritablement durable, le nouveau contrat social doit assurer la transition vers les énergies renouvelables et ainsi atteindre l’objectif zéro émission d’ici à 2050.  Le Secrétaire général a demandé à tous les pays d’envisager d’inclure six mesures positives pour le climat dans les efforts qu’ils déploient pour sauver, reconstruire et relancer leurs économies.  Il a notamment cité les emplois verts, la fin des subventions pour les combustibles fossiles et la prise en compte des risques climatiques dans toutes les décisions financières et politiques.

    Quant au nouveau pacte mondial, il doit faire en sorte que les systèmes politiques et économiques mondiaux garantissent l’accès de tous aux biens publics essentiels, car ce n’est pas le cas aujourd’hui.  Le nouveau pacte doit reposer sur une mondialisation juste, fondée sur les droits et la dignité de chaque être humain, sur une vie en harmonie avec la nature et sur nos responsabilités envers les générations futures.  IL va falloir intégrer les principes du développement durable dans tous les processus décisionnels, afin d’orienter le flux des ressources vers une économie verte, durable et équitable, a-t-il précisé.

    Plus de 70 ans après leur création, les institutions multilatérales doivent elles aussi être modernisées afin de représenter plus équitablement tous les peuples du monde, plutôt que de conférer un pouvoir disproportionné à certains et de limiter l’influence des autres, a poursuivi le Secrétaire général.  Nous n’avons pas besoin de nouvelles bureaucraties, a-t-il estimé, mais d’un système multilatéral qui innove en permanence, qui bénéficie aux peuples et qui protège notre planète.

    Le multilatéralisme du XXIe siècle doit se structurer en réseau: il doit relier entre elles les institutions mondiales, telles que les banques de développement, les organisations régionales et les blocs commerciaux, à travers les secteurs et les zones géographiques.

    Le multilatéralisme du XXIe siècle doit être inclusif: il doit s’ouvrir à un cercle bien plus vaste d’acteurs, en faisant appel aux capacités de la société civile, des régions et des villes, des entreprises, des fondations et des institutions universitaires et scientifiques.

    Pour M. Guterres, ce n’est qu’ainsi que nous garantirons un multilatéralisme efficace, à la hauteur des épreuves du XXIe siècle.  Il a conclu en disant que pour venir à bout des fragilités et des problèmes actuels, il nous faut plus de coopération internationale, et non pas moins; des institutions multilatérales renforcées, et non pas désertées; une meilleure gouvernance mondiale, et non pas une mêlée chaotique.  

    La pandémie a bouleversé le monde, a-t-il concédé, mais ce chamboulement a dégagé un espace pour quelque chose de nouveau.  Elle nous a appris que nos choix comptent.  « Au nom de l’avenir, il est impératif que nous fassions les bons choix », a martelé le Secrétaire général.

    Source :
    https://press.un.org/fr/2020/ag12268.doc.htm

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